dimanche 30 juin 2013

Contes de la folie ordinaire

Charles Bukowski

Le Livre de Poche
1967-1972

190 pages

Lecture partagée avec manU






Au risque de passer pour une frustrée,  je me lance...
Alea jacta est  

Christine la masculine :
Vingt et un contes plutôt vingt et un portraits au vitriol lancés comme des scuds et je vous assure certains font très «mâles». On m’a conseillé de lire ces nouvelles au second degré et mon côté masculin s’est rapidement exécuté. Comme un voyeur, j’ai maté à travers le trou de la serrure et j’ai adoré. Un mélange de fascination et d’admiration m’a envahi pour cet auteur : son manque de tact qui envoie valser les conventions, son sexisme dérangeant, son franc parlé déroutant, sa violence verbale et sa force d’écriture. Un écrivain provocateur à la verve brutale, sans limite avec un je ne sais quoi de désespoir, de colère et de révolte.
Entre réalités et fantasmagories, mensonges, vérités, divagation et abus d’alcool Charles Bukowski est infecte, détestable, ignoble, exécrable mais délicieusement jubilatoire. Il décrit une Amérique profonde en pleine crise et balance la baise dans la misère et la folie sociale. Il dépasse les limites de l’acceptable, c’est un fait, on l’accepte ou pas mais putain on en demande encore !

Christine la féminine :
Pfeu, Pfeu (je crache dans mes mains), Charles à nous deux !
Depuis le temps que je voulais me payer ta tête, tu vas t’en retourner dans ta tombe avec tout le respect que je te dois.
Il y a pas à dire, tu ne sais PAS parler aux femmes toi, mais tu sais quoi, ton haleine fétide et ton coup de rien, pardon de rein, qui dure le temps d’un va et vient, merci trop peu pour moi. Je te la fais rapide, comme les lapins : toutes ces femmes, les filles du bordel et du bar à putes, Linda, Sarah et les autres, elles simulaient. Ben oui ! Faut pas abuser non plus, tu ne crois quand même pas que pour 2 dollars, avec ces hommes répugnants dénués de sentiments, elles allaient atteindre le nirvana ? Et oui, Charles, un orgasme, il faut aller le chercher, le désirer, le mériter, l’accepter avec respect,  douceur avec un temps soit peu de rêve et d’amour, c’est le prix.
Connais-tu la différence entre un bon et un mauvais vin ? Un bon vin, tu le caresses du regard, tu admires sa robe soyeuse, tu l’humes, ensuite tu le grumes pour augmenter sa température et dans ta bouche quand  il présente une bonne longueur, tu fais durer le plaisir et là tu avales par petites gorgés, un délice. Un mauvais vin, tu avales et tu vas gerber. Et bien entre  l’amour et la baise c’est la même chose…
Bukowski déteste les femmes ou plutôt il adore ce qui lui sert de vidoir ! Tout y passe, dans le livre j’entends : exhibitions, érections, éjaculations, fellations et quand il n’y a pas de femelles, un whisky, une branlette et au dodo. Les femmes ou plutôt leur con est étalé comme un morceau de viande,  dans toutes les positions, sous toutes les coutures, pourvu que ça rentre que ça sorte que ça rentre que ça… Oups ben même pas le temps que ça gicle déjà, rooh !... Bukowski, je te le dis entre quatre yeux, tu es immonde, dégueulasse, abject avec les femmes, un tue l’amour dépourvu de cœur et d’humanité.
J’ai quand même voulu comprendre pourquoi ce laid et odieux bonhomme est devenu misogyne. Je me suis dis celui-là il n’a pas du avoir une enfance douce et heureuse ! Bingo ! Père violent, alcoolique, castrateur et mère soumise et inexistante. Même schéma de construction, il est vrai que pour se construire ce n’est pas l’idéal. Quand on a compris le personnage on comprend son œuvre, il écrit ses mots comme il les pense pour panser ses maux.
Bon vous aurez compris, j’ai été intéressé par le regard acerbe de Bukowski sur les femmes qui sont sa douleur et toute sa vie. Parfois touchée mais souvent agressée, mon côté féminin et le premier degré l’ont souvent emporté mais je dois admettre une certaine fascination pour son écriture. 
Sans rancune Charles ! Bon c’est vrai je me la joue facile, tu ne peux me répondre mais c’est un juste retour des choses après t’être tant vidé. Peut être nous verrons nous dans l’au-delà, tu iras baiser sur ma tombe et moi j’irai cracher sur la tienne.

Au nom du père
Du fils
Du Bukowski      
Amen !


Charles Bukowski

Un grand merci à toi pour ce cadeau pervers et délicieusement jubilatoire ;) 

La chronique Bukowski de manU c'est ici

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mercredi 26 juin 2013

Un couple

Emmanuèle BERNHEIM

Editions Gallimard
100 pages

1987


A chacun son talent !
Merci de me le rappeler
Merci tout simplement...
 

 
 

«Loïc allait s’allonger sur elle. Ils feraient l’Amour sans froisser les draps ni les couvertures, sans rien défaire. Puis ils se laveraient et ils se rhabilleraient. Elle tapoterait le lit. Pas de plis ni de taches, pas de poils et pas d’odeurs. Aucune trace.»

J’ai détesté et adoré ce livre à la fois, je vous assure c’est possible. Un mélange de malaise et de sublime qui m’ont tenu de la première à la dernière page.
Pour les amateurs de Jane Austen, un conseil, n’ouvrez jamais ce récit. Nous sommes à mille lieux  des regards sulfureux, des mains qui se frôlent, du cœur qui explose, de la passion qui envenime, très loin de l’extase et de ces clichés qui font rêver.
Je ne ferai pas long pour un récit très court. Emmanuèle Bernheim nous décrit l’autopsie d’ un couple, Hélène et Loïc, qui s’observent, se détaillent, vont s’immiscer dans la tête l’un de l’autre, se masturber l’esprit, se torturer, s’imaginer des choses sans le moindre fondement. Pas de corps qui s’enlacent au coin du feu. Un gant sale traîne sur le lavabo, ses cuisses restent poisseuses, des poils collés par le sperme, des dents qui s’entrechoquent  et un diaphragme lavé et rangé dans sa boite. Une introspection crue qui peut laisser un goût amer. Ils se cherchent et se rejettent, se font l’amour en silence, se parlent peu, se regardent beaucoup et pourtant, ils  brûlent,  se consument l’un l’autre et m’ont ravagée tout au long de ce récit.
Autopsie d’un couple qui m’a épuisé et une fin qui m’a laissé… comment dire…bouche bée !
J’ai reconnu la plume acide de cette auteure. Son écriture sans détour va droit au but, à l’essentiel, sans fioriture ni préliminaire. Un rythme effréné qui surprend car tout en retenue. Les défauts sont décrits à la loupe comme pour anéantir la libido. Il s’agit pourtant de ce qu’il y a de plus beau et de plus effroyable : l’Amour.
Un récit qui vous laisse le souffle court comme après une nuit d’amour.
Emmanuèle Bernheim… Oh oui, encore !
 
Emmanuèle Bernheim
 
 

 

lundi 24 juin 2013

Comptines des papas


Livre & CD
Jeux et petits massages pour bébé

Auteur : Gilles Diederichs
Musicothérapeute et relaxologue

Illustrateur : A Graux

Edition Nathan


 

Oh hé les jeunes mamans !
Vous voulez un peu plus de temps pour vous, sans bébé dans les jambes ? Le temps de prendre un bon bain ou tout simplement faire du lèche-vitrine sans votre boulet préféré qui crie, qui pleure et réclame vos bras ? Vous voulez que papa participe un peu plus à son éveil et passe un peu plus de temps avec son enfant ? Il vous suffit de le demander. Voilà une excellente idée, un livre CD exclusivement pour les pères. Oui, vous avez bien lu, les «Comptines des papas» vont permettre à votre cher et tendre de passer un moment câlin avec sa progéniture. Des chansonnettes, aussi douces que ludiques, dont certaines de votre enfance, vont l’éveiller tout en riant et jouant. Ces comptines sont accompagnées d’un livret qui permet de joindre aux paroles et à la musique, des gestes, des jeux et des petits massages qui favorisent l’éveil ainsi que l’échange et la complicité de bébé avec son papounet.   
Ce livret est idéal pour les enfants jusqu’à trois ans. On y trouve des chansons pour faire le yoga des papas, une autre pour avoir une déferlante de bisous dans le cou, un magnifique « cha-cha-cha » pour jouer à « coucou-caché » et bien sûr des classiques pour se retrouver à quatre pattes à jouer aux petits indiens, pour finir par une délicieuse berceuse qui va endormir votre petit garnement ou votre adorable chipie. Un conseil les filles, si vous voulez faire un shopping un peu plus long, apprenez à votre chérubin à utiliser son index et appuyer sur la touche « replay » ! Bon shopping !
Encore un doute ?
 
Oh hé les copains zé les copines, c’est moi Gina ! Vous  z’en avez marre d’être dans les bras de maman ? Z’é la solution « Comptines des Papas ». Un CD avec douze zolies sansons pour zouer, crapahuter faire des câlins, des papouilles, des guili-guili et tagada sur les genoux de papa. C’est trop souette non ?!
Alors fini « Papa est en bas qui fait du chocolat », NON ! papa est bien en haut avec bébé pour jouer, chanter, rire, se rouler par terre pendant que maman prend un peu de temps pour elle.
«Bébé est dans les bras de papa
Qui voyage déjà
Et ses yeux si charmants
Se ferment doucement.»
 
"Comptines des papas" un petit bonheur pour toute la famille.
 
Une douce dédicace à Gina venue au monde le 7 juin et à qui je souhaite une belle et douce vie.
 
La gym des bisous
 
 
Je remercie Babélio et les éditions Nathan pour cette découverte.
 
 
 
 

dimanche 23 juin 2013

Dimanche Classique III

Lettre d'Anaïs NIN à Henry MILLER
Liaison Passionnée

Sur

Les Quatre Saisons de Vivaldi
Concerto N° 2 en G Mineur
Eté 3eme Mouvement - Orage

Violon : Nigel Kennedy
Citadelle 2005


 
 

Oh ! Henry,

Ta lettre de ce matin m’a tellement remuée. Quand on me l’a donnée, je me suis sentie submergée par tous mes sentiments artificiellement refoulés. Le simple contact de ta lettre me provoquait la même émotion que lorsque tu m’avais prise tout entière dans tes bras. Tu devines alors ce que j’ai éprouvé en la lisant. Tu as trouvé tous les mots qu’il fallait pour me toucher et me conquérir et j’étais mouillée, et tellement impatiente que je vais tout faire pour gagner un jour. Je t’appartiens. Nous allons vivre une semaine comme nous n’en avons jamais rêvé. «Le thermomètre va exploser.»
Je veux sentir encore le martèlement violent au fond de moi, sentir le sang brûlant courir plus vite dans les veines, sentir le rythme lent, caressant, et puis soudain les coups violents, sentir l’excitation pendant les arrêts, quand j’entends des bruits de gouttes d’eau… et te sentir palpiter dans ma bouche, Henry.

 Oh ! Henry, je ne supporte pas de t’écrire. Je te veux, comme une folle. Je veux écarter tout grand les jambes, je fonds, je tremble. Je veux faire des choses tellement folles avec toi que je ne trouve pas les mots pour en parler...

Anaïs
Anaïs NIN
 
 
A dimanche prochain, peut être, ici ou ailleurs ...

jeudi 20 juin 2013

Magasin Général

Tomes IV & V
Confessions
&
Montréal

LOISEL & TRIPP

Edition France Loisirs
160 pages



 Notre Dame des lacs, le 20 juin 1920
 
Mon Chum de Gars,
Ces sentiers longés d’érables, cet horizon d’un blanc immaculé m’ont laissé un souvenir impérissable. Il me fallait retourner à Notre-Dame-des-lacs. Je ne pouvais rester plus longtemps loin de ce paysage féérique et de ces villageois autant pittoresques qu’attendrissants, alors j’ai pris un retour vers le passé pour retrouver ce village et ses habitants  qui m’ont tant manqués.

Deux habitants, malheureusement, nous ont quittés, pour monter, là-haut, à la droite du Père mais quel bonheur d’avoir retrouvé tous les autres. J’ai pris le temps de faire plus ample connaissance avec chacun d’eux, comme le curé du village, Réjean, qui garde secrètement la confession de Marie. Il y a aussi le vieux Noël toujours sur la construction de son bateau. Le fera t’il naviguer un jour ? Il fait quelque peu bourrin, certes, avec son œil en moins  mais finalement tellement tolérant. Il lit, comme dans un livre ouvert, dans le cœur des hommes, dans le cœur de Serge.  J’ai croisé Gaëtan et son «Howowo», toujours émouvant et si innocent. Serge l’a pris dans son restaurant « La Raviole » et m’a dit qu’il avait un don particulier pour la cuisine, le bougre, et quel talent ! Je n’oublie pas les vieilles  sœurs Glandu toujours aussi généreuses pour  véhiculer la rumeur mais finalement sans elles le village serait bien monotone. Et puis Marie, la belle et douce Marie qui se pose dix milles questions sur sa relation avec Serge. Le beau Serge, si précieux, si gentil si prés et si loin à la fois.
Mais hier ce délicieux tableau a éclaté en mille morceaux. T’sais que Marie est veuve depuis bientôt un an. Un an te rends-tu compte ? Une année d’abstinence de quoi rendre dingue n’importe quel disciple ! Et oui  doux Jésus, t’sais, Marie a couché avec le chum d’une autre, sa voisine, et depuis le village est en pleine effervescence. Marie veut tout quitter pour Montréal, pis v’là le curé ….. Euh….enfin curé si l’on veut, je le trouve un tantinet bizarre et confus ces derniers temps.  Tabarouette ! Pis c’est la Marde quoi ! C’est pas catholique tout ça j’te dis,  câline de bine !!
 
Pis j’vois ben qu’toi comme moi, t’en reviens pas ! … J’ai trop besoin de toi icitte coudonc ! La situation m’échappe, les villageois sont au bord de la dérive et se chicanent. Pis Serge ne sait plus où donner de la tête, le Magasin Général va bientôt fermer ses portes.
Tabarnac ! C’est la pénurie j’te dis !

Viens vite ….
A tantôt et comme ont dit icitte,

Je t’aime ben gros et  t’en roule une bien baveuse.

                                                                                                        Ta chum de Nana.
PS : J'tai gardé du sirop d'érable, j'sais qu't'aime ben ça ...

 

dimanche 16 juin 2013

Dimanche Classique II

Verlaine à Rimbaud
Sur une musique de :
Wolfgang Amadeus Mozart                                            

Concerto pour piano
N° 23 - K. 488 
2ème mouvement - Adagio


Qui m'aime me suive ...


Amadeus "Aimé des Dieux"
 
 

Paris, le 2 avril 1872
Du café de la Closerie des Lilas
Bon ami,
[...] Merci pour ta bonne lettre ! Le "petit garçon" accepte la juste fessée, l'ami des crapauds" retire tout,  et n'ayant jamais abandonné ton martyre, y pense, si possible, avec plus de ferveur et de joie encore, sais-tu bien, Rimbe.
C'est ça, aime-moi, protège et donne confiance. Etant très faible, j'ai très besoin de bontés. Et de même que je ne t'emmiellerai plus avec mes petites garçonnades, aussi n'emmerderai-je plus notre vénéré Prêtre de tout ça, et promets-lui pour bientissimot une vraie lettre, avec dessins et autres belles goguenettes.
Tu as dû depuis d'ailleurs recevoir ma lettre sur pelure rose, et probablement m'y répondre. Demain j'irai à ma poste restante habituelle chercher ta missive probable et y répondrai... Mais quand diable commencerons-nous ce chemin de croix,  hein ?
Gavroche et moi nous sommes occupés aujourd'hui de ton déménagement. Tes frusques, gravures et moindres meubles sont en sécurité. En outre, tu es locataire rue Campe jusqu'au huit. Je me suis réservé,  jusqu'à ton retour,  2 gougnottes à la sanguine que je destine à remplacer dans son cadre noir le Camaïeu du docteur. Enfin, on s'occupe de toi, on te désire.
A bientôt, pour nous,  soit ici, soit ailleurs.
Et l'on est tous tiens.
P.V.

 
Le Coin de Table de Henri Fantin-Latour 1872
(de gauche à droite Verlaine et Rimbaud)
  
 
Verlaine sans Rimbaud ou Rimbaud sans Verlaine,  une union dévastatrice et intemporelle.
Deux talents, deux génies qui se sont trouvés pour mieux se perdre…



A mon Dormeur du Val...


 
A dimanche prochain... peut-être ...


vendredi 14 juin 2013

L'Homme qui marche

Jirô Taniguchi

Casterman Écritures
155 pages
1992


(Lecture partagée avec  manU )


 
 

Le toucher, l’ouïe, l’odorat, la vue, le goût, voilà nos cinq sens à l’honneur dans ce délicieux manga qui va nous ramener aux vraies valeurs.
Après les kilos pris avec «Le Gourmet Solitaire» de Jirô Taniguchi, il me fallait bien pour éliminer poursuivre avec ce même auteur et marcher, marcher et marcher encore.
Quel bonheur de flâner au coté de cet homme paisible et tranquille, de cet écrivain à la plume si sereine et au dessin aussi délicat que captivant. La lecture de ce manga a réveillé en mon for intérieur une zen attitude que j’avais quelque peu mis de coté ces derniers temps. Le stress laisse place aux futilités et nous éloigne peu à peu des saveurs qui nous sont offertes chaque jour par la nature. Quel dommage !
Avec L’Homme qui marche, tout reprend sa place, l’essentiel reprend ses droits. Après une journée dure ou stressante, venez l’accompagner au gré du vent, au détour d’un chemin, d’un ruisseau et prenez le temps d’apprécier les petits riens. Laissez-vous porter par la brise dans vos cheveux. Fantasmez sur le sourire, le déhanché  d’une femme ou le regard sulfureux d’un homme. Ecoutez le clapotis de la pluie, le chant d’un rossignol ou le claquement harmonieux des talons aiguilles sur le pavé. Arrêtez-vous quelques minutes et observez le vol d’un oiseau, d’un papillon, d’une feuille qui se décroche de sa branche et qui virevolte lentement avant d’atteindre son but final. Humez, au hasard des rencontres, la douce fragrance d’un parfum supérieur... Allongez-vous au pied d'un arbre et rêvez les yeux ouverts. Laissez perler sur vos doigts la rosée matinale et marchez pieds nu sur la pelouse ou le sable chaud. Un Je T’Aime à la volée, le Bonjour d’un inconnu, nous passons à coté de toutes ces choses merveilleuses tous les jours sans les voir ni les entendre, obnubilés que nous sommes par notre carcan quotidien.
Ce livre en dit peu par les mots mais les dessins se suffissent à eux-mêmes. Après une telle lecture, nous réalisons où est l’important, le vrai bonheur. Il est juste là, devant nous, tout près, il suffit d’ouvrir grand les yeux, d’observer et de tendre la main.
Besoin d’un lâcher-prise ? Venez déambuler avec l’homme qui marche. Ce manga est un poème, une douce odeur qui vous rappelle votre enfance, un moment de pur bonheur, comme un retour aux sources.
Alors lève-toi et marche…
Antho que tu lises ce billet ou pas, il t’est dédié. Allons marcher dans les allées d’un cimetière, nos chers disparus ont tant de secrets à nous raconter, ensuite, nous longerons  la plage et rendrons le  coquillage à la mer. Regarde! la vie est là simple et tranquille. De belles choses nous attendent…
 
C'est vrai...A quoi bon se presser...
 
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mardi 11 juin 2013

Le Gourmet Solitaire

Jirô Taniguchi
Masayuki Kusumi


Casterman
198 pages

 

Voyage gastronomique au pays du soleil levant. La cuisine Japonaise n’a plus de secret pour moi. Après toutes ces recettes, ces menus plus alléchants les uns que les autres, je suis fin prête pour vous préparer un repas dans la pure tradition nippone. Ce manga, tsunami de saveurs et d’émotions, vous met l’eau à la bouche dés l’entrée et vous régale jusqu’au dessert.
Quelque peu désorientée  par la lecture de droite à gauche, j’avoue qu’il m’a fallu un petit temps d’adaptation et parfois une relecture de la page afin de la savourer à sa juste valeur. Mais très rapidement j’ai été rattrapé par les dessins onctueux et la plume aigre-douce de Tanaguchi.
 
Fin gastronome et importateur indépendant, cet homme solitaire va durant dix-huit jours exciter nos papilles gustatives et nous balader dans les plus beaux quartiers de Tokyo ainsi que quelques villes afin de nous faire découvrir la fine gastronomie de son pays. Rien ne lui échappe, les grands comme les petits restaurants, les mets raffinés ou la cuisine rapide de comptoir. Tout va passer sous son regard et son palais critique.
Pas d’horaire pour passer à table, sa journée est rythmée par son travail mais surtout par ses  fringales permanentes qui lui permettent de découvrir et de nous présenter les spécialités typiquement  locales. Chaque jour un menu et le plaisir de le regarder passer à table, de découvrir en même temps que lui son plat du jour. Un vrai cérémonial. On salive de plaisir de voir ce gourmet solitaire repu. Voilà un livre, délicieux mille feuilles, où finalement il ne se passe pas grand-chose et c’est là que Taniguchi est  maître en la matière car une fois que l’on a gouté à ce manga on ne peut le lâcher, par curiosité et surtout par gourmandise.
   
Ce gourmet n’est ni pressé ni stressé, il a ce qu’on appelle au Japon un sacré "Yogû". Il prend le temps d’apprécier et de savourer son repas, plus rien n’existe quand il est à table. Il honore chaque bouchée, chaque cuillerée, cela en devient presque jouissif de le regarder déguster son Takayaki, beignet de poulpe, ou un Mamekan, divine pâtisserie japonaise.
Au fil des restaurants, des décors nippons,  des menus et de son appétit, sa mémoire et sa langue se délient pour nous laisser entrevoir une petite fenêtre sur son passé, ses amours, sa vie comme une auto-psychanalyse par la bouffe.
 
Si je l’avais suivi dans ses festins quotidiens, je serai une vraie petite Sumo. En attendant, je veux bien devenir votre geisha pour un soir et vous préparer, le souvenir d’un riz à la sauce Hayashi accompagné de ses bouchées à la viande façon  Sûmaï, un délicieux Wagashi au doux nom sucré d’Amanatto suivi pour la digestion d’un bon saké.
 
Vous avez encore un petit creux ? Rendez vous  avec Le Gourmet Solitaire, une histoire sans faim !
 
 
 抱擁
 
 
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vendredi 7 juin 2013

BLAST

Grasse Carcasse - 1

Manu LARCENET
Edition DARGAUD
204 pages
2009

 
 
Attention au
 


!


Effet de souffle, onde de choc, surpression et explosion. S’il se propage plus vite que le son  et qu’il entre dans votre corps, il provoque des dégâts internes considérables.

Polza Mancini 38 ans, écrivain, est un personnage hors norme. Obèse, il pèse 150 kg, une grasse carcasse mais également une masse lourde d’émotion, de naïveté et d’espoir, il peut même s’envoler. A la mort de son père, Polza foudroyé par le Blast,  va tout laisser tomber et devenir clochard par choix. Il réalise enfin qu’il est libre et que désormais il ne décevra plus personne. Plus de minute réglementaire, il a tout son temps et il le prend. Sa vie d’errance  le mène vers Carole mais il se retrouve en garde à vue, soupçonné d’avoir fait du mal à cette femme s’en que nous sachions réellement quoi. Les deux flics en quête de vérité et en soif de pouvoir, tels deux hyènes, vont pourtant devoir attendre de longues heures car le présumé coupable n’a pas l’intention de révéler la vérité à la va-vite mais souhaite expliquer avec précision le raisonnement de ce geste qui le condamne d’avance. Il nous guide lentement et doucement vers l’origine de son mal et nous emmène dans les méandres de son enfance et de ses sentiments les plus profonds. Il pèsera minutieusement la teneur et la nuance de ses propos.

Parfois nos actes ne nous appartiennent pas directement. Un criminel est-il le seul responsable quand on réalise que son enfance n’a été que brutalité, violence, haine et misère sociale ? Qui est le plus condamnable, la personne qui a porté le geste, ses parents castrateurs qui l’ont mal aimé, le voisin pour s’être tu ou la société pour lui avoir tourné le dos ?
 
Polza, nous semble dépourvu de sentiments et pourtant quelque chose nous attache à lui s’en savoir quoi exactement. Il nous balade entre chimère et réalité sur son chemin de croix et nous restons bouche bée à écouter et comprendre son histoire. Toujours sur le fil du rasoir nous nous attendons à chaque seconde à ce que ce personnage bascule dans la folie, mais Polza reste maître du jeu, il tient les rênes et nous tient à la gorge.
Le coup de crayon, les dialogues et les silences, voilà les maîtres mots qui caractérisent le génie de Larcenet. Son graphisme est inimitable, les mots frappent avec justesse et ses silences nous en disent long.
C’est avec bonheur que j’ai retrouvé l’auteur du «Combat ordinaire»  en plus puissant, plus grave, plus tortueux. On aime ou on déteste mais on ne peut être mitigé. Ce premier volet est un pur Chef-d'œuvre. Récit éprouvant et déconcertant qui alterne garde à vue et souvenirs.
Blast ou comment une explosion d’émotion peut bouleverser une vie.
 
"La légitimité du dégoût face à la difformité est un principe universel. Quand j'étais enfant, il paraissait acquis que c'était là une loi naturelle à laquelle il était juste de se plier... alors peu à peu, l'anomalie n'est plus une simple fraction d'une personnalité plus complexe, plus riche... l'anomalie est votre identité". 
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Une ardente patience

(Le facteur)
Antonio SKARMETA

Editions : POINTS
156 pages




La réunion de deux êtres que tout oppose. Un cahot sur le chemin de la vie qui vous détourne de votre voie et vous bouleverse jusqu'au plus profond de votre âme. Ils n'avaient rien en commun si ce n'est  un désir de s'abreuver de la vie jusqu'à plus soif.
Mais il est des rencontres qui ne peuvent s’oublier quand elles sont placées sous le signe du sublime et de la poésie. Lorsque au hasard de votre chemin un homme célébrissime se hisse vers vous et que ce monument se nomme Pablo Neruda comment rester de marbre ? Un homme comme il en existe peu, un vrai terrien, entier et passionné. Un homme amoureux  de la vie et  de ses semblables.

1969. Le Chili, est un pays épris de liberté, de démocratie, charnel et marqué par les premières télévisions en couleurs. Mario, 17 ans, ne souhaite pas suivre la lignée des pêcheurs comme son père et la plupart des hommes du village. Mario est amoureux des mots, il rêve d’écriture de poésie, de littérature  alors quand on lui propose de devenir facteur et d’avoir pour seul et unique client Pablo Neruda, Mario voit là une opportunité rêvée pour faire une des plus belles rencontres de sa vie.  Il ne lâchera plus le poète. Il marchera dans ses pas en se nourrissant de chacune de leurs discussions.  L'homme de lettres se sentira, au début, quelque peu agacé par son altruisme et son affront. Mais peu à peu tel le Petit Prince et le Renard, ils parviendront à s'apprivoiser et apprendront à se faire confiance mutuellement.  Comment peut-on résister à ce jeune homme attendrissant, naïf et plein de surprise ? Cette rencontre pleine de verve,  d’échange et de magie se transformera en une belle et forte amitié. Deux êtres que tout opposait parviennent à se trouver bien au-delà des différences. Et les barrières liées à leurs âges et à leurs milieux fondent sous l'effet des liens extraordinaires qui doucement  se nouent.
Mario sera pendu à ses lèvres se nourrissant des paroles de son  maître absolu. Il apprendra à ses côtés à faire chanter les mots tandis que Pablo Neruda y retrouvera la ferveur de sa jeunesse passée et un certain amusement. Echanges de bons procédés.
Mario lui demande de lui enseigner le verbe afin de courtiser la belle Béatriz. Il lui enseigne les rudiments de la poésie, des mots, des phrases. Mais tandis que Mario apprend à dire l'amour et se consumme pour Beatriz, le Chili, lui, brûle et se perd dans une tourmente politique sans précédents. Balayés les mots d'amour et le lyrisme, il ne reste plus que les cendres incandescentes d'une terre meurtrie...Et aussi l'exil.

Un face à face inoubliable, on rit, on pleure et on referme ce livre avec une certaine tristesse.
Une ardente patience un livre d’une poésie à couper le souffle !

Un livre sur une rencontre inoubliable, puissante et profonde. Au hasard des lignes, entre deux mots échangés, une rencontre de l'instant qui apaise le coeur et réconforte l'âme.
 

Une rencontre pareille à celle entre deux lecteurs reliés par une amitié sincère au-delà des années, de la distance et des différences.

Très Bon Anniversaire à toi Claude. Puissent ces liens qui parfois nous dépassent perdurer dans le temps,  dans la vie et bien au-delà.

Abraço Grande

Hahasiah & Chris
 


 

Post it :
Une Mention particulière à une jeune femme pétillante, surprenante et à la plume sublime. Merci  ma Pestouille pour ce cadeau qui m'a mené vers Mario et Pablo. Ce fut une rencontre tout en émotion, en profondeur et une histoire magnifique. Puisse la vie te guider vers des rencontres inoubliables, apaisantes et heureuses. 
 
Chris 
:D
 
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