samedi 15 juin 2019

Fleur de l'ombre


Kazuo KAMIMURA - 1976  
Manga intégrale 1

Les Editions : KANA
Collection Sensei
Pour public averti

Masse Critique Babélio



« Même la solitude à elle seule rend capable d’aimer » 

Je m’appelle Sumire, j’ai 20 ans et je suis vendeuse dans un grand magasin tokyoïte. Il m’arrive parfois … souvent … d’accepter les invitations lubriques de certains clients. Boire un café après mon service, mais pas que…

« Accordez-moi, voulez-vous, un petit moment de caprice et de liberté » 

Oui, je me prostitue. Je suis consciente de mon pouvoir de séduction et cet avantage m’offre une grande liberté et un joli train de vie. Je décide de qui et quand. Et nul n’a le droit, en vérité, de me blâmer, si ce n’est moi même.

Je suis le fruit d’un amour défendu. Ma mère vient de se suicider, triste et lasse d’avoir attendue en vain, son amour de toujours, un homme marié. Que le ciel m’en soit témoin, je jure de ne jamais succomber aux abysses de l’amour. Ma mère fut une femme de l’ombre. Je le serai à mon tour mais uniquement par désir. Je refuse de dépendre d’un homme. Je monnaye mes charmes pour garantir ma liberté et lutter contre le machisme. En échange, j’offre un peu d’attention, des mots, du sexe et parfois même du silence. 

« Le noir sied à merveille à une prostituée » 

Kazuo KAMIMURA nous dresse le portrait d’une femme émancipée et indépendante dans le Japon des années 70 où la gente féminine est contrainte au seul rôle de femme au foyer. Sumire, dépourvue de sentiments, assume totalement son statut de femme entretenue et revendique son choix de vie. Elle échappe ainsi à la condition des femmes soumises. 

Elle porte en elle le chagrin de sa mère disparue ainsi qu’un esprit cruel et vengeur. L’auteur crée une atmosphère malaisante et une héroïne au calme désarmant.  Je suis fascinée par cette femme et ses nuances de gris qui préfère l’ombre au soleil pour éviter de faner trop vite. 
Dans sa froideur et son mutisme protecteurs, on cherche la faille, le moment du lâcher prise car peut on se protéger de la nature humaine et de ses propres sentiments ? En réalité, vendre son corps et son âme, n’est ce pas déjà un acte de soumission ? Une vie par procuration ? 

« Laisse… Rentre donc. 
Tu chies un coup, une branlette et dodo ! 
Ça t’reviendra moins cher… » 


Les états "Dame" de Sumire, Fleur de l’Ombre … 
« Pourtant j’étais très belle, oui j’étais la plus belle, des fleurs de ton jardin » F. Hardy



Un grand merci à Babelio 
et les éditions Kana pour cette immersion au pays du soleil levant.