lundi 26 février 2018

Monsieur Coucou






Joseph Safieddine
Kyungeun Park


Les éditions Le Lombard 
2018







C’est avec émotion, il y a quelques jours, que j’ai tourné la dernière page de ce livre. Impossible pour moi de garder le silence et de ne pas vous délivrer mon ressenti tant il y a longtemps que je n’avais été aussi touchée par un roman graphique.

Depuis la semaine dernière, je me demande comment vous parler avec justesse de ce livre,  de sa  profondeur, de sa générosité. Je tourne, je vire, je jongle avec les mots mais ils ne reflètent pas mon ressenti, alors si je vous en parlais avec simplicité ? 

On ne peut pas dire que le titre soit accrocheur et pourtant quand on comprend sa signification tout prend son sens et devient philosophie et évidence.

Pourquoi Coucou ? C’est la première question que je me suis posée !

COUCOU : Gros oiseau passereau […]. La femelle pond chacun de ses œufs dans un nid de passereaux d’une autre espèce […] ; les parents adoptifs couvent, puis nourrissent le jeune coucou, qui jette les œufs de l’espèce-hôte par dessus bord. [Le Larousse]

Toute la clef de l’histoire est dans cette définition.

Il y a bien longtemps Abel a quitté sa famille et son pays, le Liban. En s’exilant à Paris, il enfouit son identité au plus profond de son être et renferme ainsi un passé qu’il veut à tout prix oublier. D’ailleurs, il ne s’appelle plus Abel mais Allan. Mais les choses ne se passent pas toujours comme on le souhaite.  Un jour ou l’autre les secrets de famille resurgissent et vous accablent avec violence. Parfois le temps est assassin. Le moment est peut-être venu d’affronter ses souvenirs, ses origines, sa mère… son histoire !

Moi-même fille d’exilé, je ne pouvais qu’être touchée par cet homme à la lisière de deux pays. Il affronte tant bien que mal sa culture et son histoire. Au fil des pages, on l’accompagne dans sa quête, on l’accuse, on le blâme puis on le comprend et enfin, on finit par l’aimer.






Joseph Safieddine, jeune auteur libanais, a fouillé dans sa mémoire et a posé ses maux sur cette histoire, peut-être son histoire, avec pudeur, élégance et beaucoup de sensibilité. Pour parachever ce coup de cœur, le texte est transcendé par les couleurs chaudes et le très beau crayonné des dessins. Kyungeun Park retranscrit à merveille les expressions sur les visages, les émotions dans les regards et le silence devient langage. On ressent la brise dans les cheveux d’Abel et la moiteur sur sa peau brûlée. Les paysages sont d’une telle splendeur que les parfums de coriandre, de cumin et de cannelle viennent caresser vos sens.





Entre plume et pinceau, ce livre éveille en nous une furieuse envie d’évasion vers soi et vers l’orient… 
  
Monsieur Coucou où quand l’oiseau tombe de son nid…



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