Sandrine Revel
Les Editions : Dargaud
« Je tenais pour acquis que tout le monde partageait ma
passion pour les ciels nuageux. J'ai eu tout un choc en apprenant que certaines
personnes préféraient le soleil. »
Les Variations de Goldberg sont à
Glenn Gould ce que Almost Blue est à Chet, le concerto d'Aranjuez à Joaquin Rodrigo ou Black Hole Sun à Soundgarden. Bach
a composé les variations mais Glenn s'en approprie et lui donne ses lettres de noblesse se jouant de la
technique contrapuntique inégalable du compositeur. Il apporte une vision nouvelle à cette œuvre maintes fois utilisée au cinéma comme dans « Le silence des
agneaux », « Le patient anglais » ou encore « Love »
de Gaspard Noé.
Souvent les enfants surdoués ont
la particularité d’être solitaires. Glenn n’échappe pas à la règle. A la fois rejeté et moqué par ses camarades, il se réfugie là où Mozart, Beethoven ou Bach règnent en maître. Doté d’une oreille absolue, très vite il se passionne pour la mélodie et les œuvres de ses pairs. Il fait corps à corps
avec son Chickering ne laissant que peu de place au monde qui l’entoure. Son
piano est le prolongement de ses doigts… La musique est le prolongement de son
âme.
« La musique est quelque
chose qui doit s’écouter en privé. Elle doit conduire l’auditeur et
l’interprète à un état de contemplation. »
Adulé par beaucoup mais critiqué par les journalistes, la presse ne l’épargne pas. Son originalité casse
les codes et son jeu pianistique surprend. Son narcissisme au clavier dérange et ses exigences deviennent de plus en plus excentriques. Ses auditeurs le réclament mais Glenn fuit les concerts car jouer en public l’ennuie profondément. Seul le
contact avec la musique l’importe. Il se consacre dès lors à la composition, la production d’émission de
radio et sa vie quasi monastique.
« La solitude nourrit la
créativité alors que la fraternité collégiale tend à la dissiper. De plus, elle
est pour l’être humain le plus sûr chemin vers le bonheur. »
Je connaissais le musicien mais très peu l’homme. Sandrine Revel réunit dans ce même album tous ses talents de coloriste, scénariste et dessinatrice pour nous délivrer une biographie riche et intéressante. Grâce à ce roman je découvre en plus du génie, un personnage obsessionnel frôlant quelque
peu la folie. Les couleurs, le crayonné et les mots ne laissent aucun doute sur
le coté obscur du musicien. L'auteur nous ballade entre les touches noires et blanches d'un piano et nous emmène dans l'univers symphonique d’un des plus grands pianistes de sa génération, préférant la compagnie des animaux à celle du genre humain.
« Je suis incapable de changer ma manière
de jouer du piano. Les gens devront m’accepter ou me rejeter tel que je suis. »
Branche ton double jack pour « Une
vie à contretemps »… Un aller sans retour …