jeudi 14 mars 2013

Une longue nuit d'absence

Yahia Belaskri
Vents d'ailleurs
ISBN 9 782364 130098
158 pages
Livre reçu dans le cadre de l'opération Masse Critique Babelio




 
 
 







Consternation !

Seul mot qui me vient à l’esprit en refermant ce livre. Comme tu as souffert mon Andalousie. Le sang a coulé dans tes ruelles, des corps déchiquetés ont endoloris ton pays,  des hommes ont oublié leur drapeau et leur patrie.

Nous sommes l’été 1936 à Malaga,  en pleine guerre civile espagnole. D’un coté les républicains, de l’autre les nationalistes dirigés par le général FRANCO. Paco a 16 ans, un sac à dos rempli de rêves et d’illusions. Il ment sur son âge pour rejoindre les républicains et défendre corps et âme  ses idéaux pour une Espagne libre. Mais Franco gagne du terrain et ressort victorieux de cette bataille. Devant un pays déchiré et à l’agonie il fuit sa terre vers l’Afrique du nord en clandestin et va continuer de se battre plus que jamais pour sa patrie. Mais il va connaître les méandres des camps prisonniers. Il sera victime de la faim, de la torture, du sang qui gicle. Il va être témoin de la folie des hommes, des corps désarticulés, des bouches que l’on bâillonne pour étouffer les cris des femmes, des hommes et des enfants.
 
Le pont de l'Europe Nerja (Malaga) à l'horizon
l'Afrique du Nord.
 
Dieu et son pays l’ont  oublié. Son cœur se remplit d’amertume, de colère et de désillusion. Mais au bout de cet enfer, Oran. Cette ville semblable à Malaga va l’adopter comme son propre enfant. Mais comment être heureux loin de sa femme, de sa famille de son Andalousie qu’il aime tant ? Combien de temps va durer cet exil, cette longue nuit d’absence ?
 
Me gusta Oràn!
 
Ce récit je l’ai pris en pleine figure parce qu’il raconte la mémoire de mes grands- parents, mais ma tendre enfance n’a pas voulu l’entendre. Ce livre vient me rappeler leurs paroles et aujourd’hui je comprends. Comme Paco ils ont  fuit leur Andalousie mise à feu et à sang dans l’espoir d’une vie meilleur ailleurs.
 
L’écriture de Yahia Belaskri est fluide, généreuse et sincère. Le texte est puissant, juste et fort en émotion mais sans  apitoiement, ni haine aucune. Ce livre ne raconte pas seulement mon histoire, il parle de la folie des hommes mais aussi des liens d’amour qui unissent les êtres et nous rappelle qu’il faut toujours aller de l’avant et se battre pour ses idéaux et ses rêves.
 
Yahia belaskri
 
Ce roman est venu à moi par deux fois, la première au salon littéraire du livre arabe où j’ai eu la chance  de rencontrer l’auteur, Yahia Belaskri qui m’a gentiment dédicacé ce livre pour un ami, et la deuxième, dans le cadre de l’opération Masse Critique de Babélio grâce aux Editions Vents d’ailleurs.

Une longue nuit d’absence, mon Espagne, mon Andalousie…

Poignant !
  
Mon buvard à émotion :
Ce livre me tenait à cœur car il raconte mes racines. Lors de l’écriture de cette chronique, j’ai jeté des tas de brouillons à la corbeille car jugés trop pathos, trop intimiste, trop politique,  trop de ci, trop de ça….et puis un soir, grâce à un quiproquo,  une personne, ni vue ni connue, a fouillé dans ma corbeille et a ressorti mes petites ratures, mes petites blessures qui ne sont ni trop ci, ni trop ça, mais juste MOI. Parfois les quiproquos viennent tout balayer, comme un vent de folie, et nous rappelle que malgré les multiples facettes qui nous servent de façade notre vrai visage ressort toujours un jour ou l’autre pour dévoiler ce que nous sommes vraiment. Je t’aime  fort. Ni point ni parenthèse, jamais raisonnable, et toujours incontrôlable. Merci !
 
Mes marque-pages :
"La mer appartient à ceux qui ont des bateaux".
"Dans les villages, on pend aux arbres et le sang ruisselle sur les collines. les poètes sont ensevelis avec des mots dans leur bouche éteinte. les fascites avancent sur les routes".
 "Les conditions de sa détention étaient terribles, dix femmes par cellule, confiées à un curé sadique et pervers, qui les a profondément traumatisées par ses méthodes, confessions publiques, châtiments corporels, vexations continuelles, insultes et récriminations quotidiennes, mépris affiché pour ces Putas qui protègents les ennemis de la nation, humiliations poussées à l'extrême".
"Déja il ne me reste ni peuple ni drapeau, ni frère, ni espoir. Il ne me reste plus qu'une attente confuse et convaincue d'une mort acceptée".
 
Adieu mon Espagne adorée,
dans mon âme je t'ai rentrée.
Et bien que je sois un émigrant
Jamais je ne t'oublierai.
(Chanson "El emigrante" 1949 Juanito Valderrama page 113)

Je remercie vivement Babelio et les éditions Vents d'ailleurs pour ce moment de lecture.


  
 
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10 commentaires:

  1. Très beau billet Cristina !
    Merci.

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  2. :D

    C'est moi qui te remercie...............encore et encore ;)

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  3. Rien à voir avec le sujet...
    Mais j'ai lu il y a quelques années de ça, un excellent roman de Javier Cercas, une histoire romancée dans l'Histoire.
    Tu connais ? Il m'avait manqué quelques points de repère pour comprendre les nationalistes, les Phalangistes et les franquistes, mais peut-être que toi...

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  4. Et bien non, je ne connais pas, je découvre, malgré mes origines.....Petite à table, les discutions de mes parents tournaient souvent autour des franquistes, les républicains, et les "No Pasaran" autant te dire que c'était très animé...C'est maintenant que je comprends certaines choses, mais il me manque encore beaucoup de chose...d'ou beaucoup de regrets....

    Je note le Roman de l'auteur Javier Cercas.... Merci :D

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    1. Je te ressortirai alors une vieille chronique d'un autre temps... A l’époque où je ne plaçais pas le mot alcool dans chacun de mes textes ;)

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  5. C'est à dire, il y a très longtemps ....:D

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  6. Petit réflexe d'adhésion littéraire. Je viens de terminer la lecture d'"exercices de survie" de Jorge Semprun (écrivain espagnol engagé), et, histoire de ne pas ressortir du bain trop tôt, je me dirige vers tes écrits. Et je ne suis pas déçu (euphémisme). Ta causerie sur la "longue nuit d'absence" est vraiment intéressante.
    Un grand merci.
    Michel

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  7. L'histoire de mon pays, que je ne connais pas, est un vrai puzzle et je commence à peine à reconstituer quelques pièces. Il était temps !

    Un grand merci à toi ! Tes commentaires sont toujours un plaisir.

    Bon dimanche

    Chris

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  8. Très beau livre sur cette période sombre de l'histoire de l'Espagne. Merci pour le partage.

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